Lectures : Es. 61. 1 à 3 et 10-11 / Luc 4. 16 à 21 / 1 Thes. 5. 16 à 24

« Proclamer une année de bienveillance… »

Peut-on rêver de voir des jours meilleurs, des jours de bienveillance en ces temps de violence, de défiance qui se généralisent ? Le monde ne sait plus à quel « saint » se vouer, ou plutôt, ces derniers jours, à quel vaccin se fier. Il semble que la profusion de communications plus ou moins fiable est en train d’alimenter chaque jour un peu plus cette défiance généralisée. Au point que bientôt tout le monde se méfiera de tout et de tous et dans tous les domaines ! À ce rythme les dégâts collatéraux risquent d’être nombreux au sortir de la crise. Peut-être même que nous en aurons les effets dans l’église si nous n’y prenons pas garde. En ces temps particuliers, comme toujours d’ailleurs, la Parole de Dieu nous invite à prendre du recul, de la hauteur, afin de ne pas nous laisser envahir par les circonstances. Certes, il ne s’agit pas d’être dans le déni, mais dans l’équilibre, dans une juste hiérarchie des valeurs et de la vérité. En ce 3ème dimanche de l’Avent, les textes bibliques nous invitent à la joie, à l’enthousiasme même, en évoquant la naissance de Jésus et ses conséquences pour le monde, pour nos vies. Méditons-les.

1°) « L’Esprit du Seigneur est sur moi… »

Cette parole donnée au prophète Esaïe a dû être une bouffée d’oxygène en son temps pour le peuple d’Israël. À l’époque, la tendance était plutôt à la morosité, au sentiment de défaite, d’échec, de défiance. Annoncer la venue d’un Messie, porteur d’un message de joie, en pleine crise nationale, il fallait le faire ! La Parole de Dieu est souvent en décalage avec la pensée humaine, celle qui prévaut dans le monde. Elle nous révèle que Dieu est un Dieu de grâce, capable de pardonner à ceux qui ont péché ; capable de restaurer, de relever celles et ceux qui sont éprouvés par diverses situations. Dieu est capable de changer le cours de l’histoire. Il guérit ceux qui ont le cœur brisé ; ceux qui souffrent d’injustice, de crainte, de déception, du mépris… Il libère les captifs, au sens propre et au sens figuré. Ce message s’adressait certes, aux exilés de l’époque d’abord. « Dieu proclame des temps de bienveillance et des jours de vengeance ». Et c’est ce qu’il a accompli du temps du prophète Esaïe. Mais l’évangile nous montre que ce message va bien au-delà de ce contexte. Il s’inscrit dans une histoire bien plus large, et concerne aussi des temps à venir.

En effet, plusieurs siècles après, dans une synagogue à Nazareth, un certain Jésus se lève et fait la lecture de ce même texte. Puis il s’assoit. Tous les yeux sont fixés sur lui. Que va-t-il dire, qu’elle interprétation va-t-il donner de ce texte ? Jésus commence par dire : « Aujourd’hui, cette écriture est accomplie pour vous qui l’entendez ». Jésus prend cette prophétie à son compte et proclame à nouveau une année de bienveillance du Seigneur. Une année qui ne concernera plus une époque seulement, mais une année qui durera jusqu’au dernier jour de ce monde. C’est la bonne nouvelle de l’évangile, le message de joie de Noël. En Jésus, Dieu dans sa bienveillance est venu dans ce monde pour nous sauver. Il est venu pardonner nos fautes, guérir nos blessures, nous libérer de toute condamnation, comme de nos addictions, ouvrir nos yeux sur la vérité, consoler ceux qui sont dans le deuil, venger ceux qui ont été victimes d’injustice, et surtout donner la vie éternelle à tous ceux qui croient.

2°) « Je suis enthousiaste… tout mon être tressaillira d’allégresse à cause de mon Dieu… »

C’est la réponse du peuple, de ceux qui ont compris le message. Réponse qui nous rappelle celle de Marie à l’annonce de la naissance de Jésus : « Mon âme exulte à cause de mon Dieu… ».  C’est une explosion de joie pour ceux qui comprennent et acceptent cette bonne nouvelle. C’est la joie pour celles et ceux qui croient en ces paroles, et dans la bienveillance de Dieu. Oui, envers et contre tout, Dieu est et sera toujours bienveillant, car il nous aime au-delà de tout. Il est allé jusqu’à accepter de devenir homme, à venir naître comme un simple homme. C’est fabuleux, que le Dieu créateur de tout l’univers, qui habite une lumière inaccessible, qui possède une intelligence et une puissance infinies, envoie son Fils unique dans ce monde en la personne de Jésus. Ceci pour nous sauver et pour donner un sens véritable à cette vie. En Jésus, nous ne sommes plus des humains perdus, déboussolés, ne sachant plus à qui faire confiance, vers qui se tourner et que penser de ces événements dramatiques qui caractérisent notre monde. En Jésus, nous sommes des enfants de Dieu, au bénéfice de sa bienveillance, de son amour, ici et pour l’éternité. Que notre joie éclate, comme celle du peuple à l’époque d’Esaïe face au message qu’il reçoit. Que notre joie éclate comme celle de Marie à l’annonce de l’ange. Que notre joie éclate devant la bienveillance de Dieu, au milieu même des temps difficiles actuels. Parce que Dieu ne laissera jamais triompher le mal, la haine, l’injustice, la mort. Parce qu’il est là pour guérir, pour libérer, pour relever, pour bénir, et venger aussi…

3°) « Le Seigneur fera germer la justice… »

« Oui, comme la terre fait sortir ses germes, … ainsi le Seigneur fera germer la justice… ». Dieu est juste, c’est le fondement même de ses œuvres. C’est même au nom de cette justice qu’il a sacrifié son Fils unique pour expier le péché du monde, qui ne mériterait qu’une éternelle perdition. La justice de Dieu est comme une semence mise en terre. On ne la voit pas toujours de façon instantanée, parfois, elle met du temps à germer et à se montrer. Mais elle finit toujours par jaillir, arrosée de nos prières, de nos actions, de notre compassion, elle finit toujours par sortir de terre. C’est notre espérance pour toutes les injustices que l’on voit autour de nous, ou celles que l’on subit parfois. Espérance pour tous ceux qui souffrent dans ce monde, pour tous les laissés pour compte, pour toutes les victimes d’injustice. Qu’elles soient injustices sociales, personnelles, internationales. C’est notre espérance pour que justice soit faite aussi à notre peuple, aux Arméniens du Haut Karabagh, aux chrétiens d’orient, comme à tant d’autres minorités opprimées. Ne les oublions pas en ces temps de Noël. « Le Seigneur fera germer la justice… »

« Proclamer une année de bienveillance… »

Une année de bienveillance, le monde en aurait bien besoin. C’est pourtant ce que Dieu proclame et propose au monde, en Jésus, depuis plus de vingt siècles maintenant. À chacun de croire, de recevoir cet amour, de s’en réjouir et d’en être des témoins vivants. Être des femmes et des hommes bienveillants envers tous.

Pasteur Joël Mikaélian  -13/12/2020