1 Tim. 6. 11 à 19 / Luc 16. 19 à 31

« Il y avait un homme riche… »

L’enfer pour les riches, le paradis pour les pauvres ! Il y a une justice, une revanche de la vie ! Voilà une histoire ou une parabole qui pourrait rassurer les pauvres et inquiéter les riches ! Mais, est-ce bien là le message de ce texte ? Pas si sûr ! Pas sûr du tout même ! Certes, il est question de riche et de pauvre, mais pas que. Et il serait faux de réduire le message du texte à cette question. L’argent a toujours eu une place importante dans ce monde. Certains sont prêt à tout pour s’enrichir, d’autres se contentent de ce qu’ils ont, d’autres encore sont contraints de vivre dans la pauvreté et la misère, à l’image du pauvre Lazare de ce texte de l’évangile. Comment se situer en tant que chrétien ? La richesse est-elle une bénédiction de Dieu, comme certains chrétiens le pensent ou conduit-elle en enfer ? A l’inverse, la pauvreté est-elle une vertu spirituelle qui mène au salut ? Quelle parole recevoir à travers ce texte propre à Luc ? Pourquoi le riche est-il dans les tourments, tandis que Lazare parmi les bienheureux ?

1°) « Il y avait un homme riche… »

Certains Pères de l’église comme le réformateur Calvin, ont pensé que Jésus raconte ici une histoire vraie et non une parabole. La question peut se poser, la mention de noms comme Lazare, Abraham donne l’impression que l’on est dans une histoire réelle. Mais quoi qu’il en soit, cela ne change rien au message. Cette histoire met en scène deux personnages, un riche et un pauvre. Deux parcours de vie très différent. Un riche qui profite de la vie, de ses biens, sans se soucier du pauvre qui est à sa porte. La situation semble ne pas le questionner, et c’est ce que Jésus fait ressortir par un contraste saisissant. Le pauvre s’appelle Lazare, abréviation d’Eléazar qui veut dire « Dieu est le secours ». Sa situation semble figée. Et Jésus ne porte pas de jugement de valeur sur la situation qu’il décrit. Le jugement viendra plus tard. C’est à la fin que chacun est jugé selon ses œuvres. Puis Jésus poursuit son histoire et nous fait pénétrer dans l’au-delà avec comme nouveau personnage Abraham. Lazare est consolé auprès d’Abraham, quant au riche il souffre dans un lieu de tourment. Et c’est là qu’un dialogue intéressant s’instaure entre le riche et Abraham.

2°) « Souviens-toi… »

Sans aller trop loin dans l’interprétation des images et des mots, le texte, à travers ce dialogue, nous donne quelques révélations concernant l’au-delà. Il y a bien une forme de vie qui continue pour tous au-delà de la mort.  Il y a bien un jugement, une séparation, deux lieux distincts séparés d’un fossé infranchissable. (Ce qui, au passage rend caduque toute idée de purgatoire. Ce qui rend également inutile toute forme de prière pour les morts). Autre chose que ce dialogue nous montre, c’est que la scène n’est pas encore tout à fait le royaume de Dieu. Jésus n’est pas encore ressuscité et glorifié et présent, comme on le voit dans le livre de l’Apocalypse. Mais il y a déjà une forme de jugement irréversible. Aussi, les paroles d’Abraham pourraient laisser penser à tort que ceux qui sont heureux aujourd’hui seront malheureux dans l’éternité, et inversement. Et on pourrait alors conclure à ce que nous disions en introduction. Ce qui serait une erreur. Ce qui est jugé ici, ce n’est pas tant la richesse en elle-même, mais plutôt, le refus de Dieu, refus de la grâce, refus de servir Dieu. Ce qui est jugé ici, c’est aussi l’égoïsme du riche, son indifférence vis-à-vis du pauvre, son manque total de compassion, d’amour, de générosité. D’où les paroles d’Abraham au riche : « Souvient-toi… » « Fais un petit retour en arrière sur ta vie. » Cette histoire nous questionne sur notre mode de vie, notre façon de considérer ou pas l’autre. La façon de nous sentir concerné ou pas, par les épreuves de ceux qui nous entourent, leurs difficultés matérielles, leur souffrance morale ou physique… C’est bien le jugement de l’indifférence que Jésus souligne ici, ainsi qu’un mauvais usage de ses bienfaits.

3°) « Je te prie alors, père Abraham… »

Le riche vient de faire une découverte terrible, il est perdu pour l’éternité, pour toujours. C’est terminé, il n’y a plus rien à faire pour lui. Par cette histoire, Jésus souligne le caractère dramatique du refus de la grâce du salut qu’il est venu accomplir. L’avenir est terrible pour celui qui refuse de se convertir, de répondre à l’appel du Christ : « Repentez-vous, et croyez à la Bonne nouvelle… Repentez-vous donc et convertissez-vous… ».

Le riche pense alors à ses frères. Et là encore il reçoit un refus. Nul besoin de miracles pour croire vraiment et se repentir. Il suffit de prendre conscience du mal qui habite en nous, de la condamnation que l’on mérite, de se repentir et de croire que le Christ a pris sur lui notre condamnation. C’est le refus de se convertir au Christ qui est dramatique. C’est ce que le riche a compris, mais trop tard. D’où sa demande à Abraham, d’envoyer Lazare vers ses frères afin qu’ils se convertissent. Se convertir, croire, c’est ce que le texte nous invite à faire ce matin, si nous n’avons pas encore fait cette expérience spirituelle.

Puis, cette histoire nous invite à vivre selon les valeurs de l’évangile, porter le fruit de l’Esprit Saint que Dieu a fait habiter en nous. Amour, paix, joie, patience, bonté, bienveillance… Tout le contraire du riche de la parabole. Avoir de la compassion pour ceux qui nous entourent, ceux qui souffrent, ceux qui sont éprouvé, vivre généreusement des dons que Dieu nous a donné. Prier pour les autres, prier pour le monde, prier, penser aux autres… C’est ce que le texte nous invite à vivre ce matin.

Conclusion :

« Il y avait un homme riche… »

Que Dieu nous garde d’être cet homme-là. Que l’on soit riche ou pauvre, le refus de la grâce mène tout droit à un avenir dramatique et définitif. C’est aujourd’hui qu’il faut se convertir, aujourd’hui qu’il faut vivre cette vie de l’Esprit, n’attendons pas demain, demain sera trop tard.

Pasteur Joël Mikaélian

25/09/2022