Lecture : Deut. 26. 4 à 10 / Luc 4. 1 à 13

« Si tu es… »

L’identité est au cœur de l’expérience humaine. Ce que nous sommes détermine ce que nous pensons, disons, croyons et faisons. La vie humaine aussi, se doit d’être rythmée par des temps comme la nature par les saisons. C’est le sens des fêtes que Dieu avait instituées dans son alliance avec le peuple d’Israël. C’est aussi le sens des « fêtes » sous la nouvelle alliance en Jésus, comme le « Carême », ce temps particulier qui nous mène vers Pâques. Il peut être pour nous temps de désert, de silence de Dieu, d’attente de Dieu ; ou temps de remises en questions, de méditations et de réflexions ; ou bien temps de préparation, de renouvellement intérieur pour faire face à la vie, aux tentations, comme ce fut le cas pour Jésus. Méditons ce matin et laissons l’Esprit Saint nous parler. Comment sortir victorieux face aux tentations du malin, de celui qui veut nous perdre, semer la confusion en nous et autour de nous ? Quel message recevoir de l’expérience de Jésus ? Comment le malin opère-t-il et comment lui résister ?

1°) « Si tu es le fils de Dieu… »

La première des tentations auxquelles Jésus a dû faire face concerne l’identité, le cœur de la vie. Le diable tente de semer le doute sur son identité, comme il le fait aussi avec nous : « Si tu es enfant de Dieu, tout doit être possible pour toi !». Si tu es dans le besoin, si tu as des besoins dans le domaine matériel, humain, demande ! Tout est possible ! La tentation dans ce domaine est subtile. Pour nous comme pour Jésus, elle arrive souvent au moment où nous sommes le plus vulnérable. Elle arrive dans une période de privation, de difficulté matérielle, de période de chômage, de précarité pour nous ou notre entourage ; dans une période de maladie… « Si tu es enfant de Dieu… comment cela se fait-il que tu sois dans telle ou telle situation ? Ce n’est pas normal ! ». Et le doute s’installe en nous de façon insidieuse : « Tu n’es peut-être pas l’enfant aimé de Dieu. Dieu a des choses bien plus importantes à faire que de satisfaire tes besoins personnels… » La tentation sème le doute sur ce que nous sommes en Jésus : des enfants aimés du Père, du Dieu tout puissant qui pourvoit et pourvoira toujours aux besoins de ses enfants. Comment y faire face, qu’elle est la réponse de Jésus ?

« Il est écrit que l’homme ne vivra pas de pain seulement, mais de toute Parole de Dieu… ». Jésus ne répond pas à la question du doute sur son identité. Il sait qui il est. Puis il oppose au malin une autre hiérarchie des besoins. Il ne nie pas les besoins humains. Il fait référence à un texte du Deutéronome : « L’homme ne vivra pas de pain seulement ». C’est-à-dire que oui, l’homme a besoin de pain pour vivre. Le pain est certes important, mais il n’est pas le plus important. Il y a plus, il faut aussi nourrir sa vie intérieure de la Parole de Dieu et de ses promesses. Il faut se nourrir de l’amour de Dieu, de sa présence, se souvenir sans cesse de son sacrifice pour nous. Voilà de quoi résister au malin et vaincre le doute sur notre identité d’enfant de Dieu. Par ailleurs, on peut remarquer que Jésus ne tombe pas dans le piège du « tout, tout de suite ». Il fait confiance à la providence de Dieu. Et il a bien raison ! L’évangile de Matthieu nous dit qu’après la tentation, les anges viendront servir Jésus. Dieu fait toutes choses en son temps. « Cherchez premièrement le royaume et la justice de Dieu ; et toutes ces choses vous seront données par-dessus ».

Savons-nous qui nous sommes ? Sommes-nous conscient de notre identité en Jésus ? Savons-nous que Dieu pourvoit toujours aux besoins de ses enfants en son temps ? Le vivons-nous ? Prenons-nous soin de notre vie intérieure ? De quoi la nourrissons-nous ?

2°) « Je te donnerai toute cette autorité et la gloire de ces royaumes… »

La tentation se déplace ensuite sur un autre terrain, celui du pouvoir, de l’orgueil, de la gloire. Etre quelqu’un de respecté, admiré ; avoir du pouvoir sur les autres, exercer de l’autorité sur ses semblables, au point que ces semblables ne le sont plus vraiment. Au point qu’ils deviennent mes subalternes, puisque je suis leur supérieur hiérarchique. Le diable tente de mener Jésus sur le terrain de l’orgueil, de la domination, le péché par excellence. Avec nous aussi, il tente de nous faire entrer dans ce jeu subtil, pervers parfois, de la domination, du mépris de l’autre. Il tente de réveiller cet orgueil qui sommeille en nous et qui ne demande que ça ! Il nous incite à devenir ses disciples, disciples de l’orgueilleux, de cet orgueil qui a fait de lui un être déchu. Par ailleurs, pour séduire, le malin se montre généreux « La gloire de ces royaumes m’a été donnée… Je la donne à qui je veux… » ? Mensonge ou vérité ? Mensonge, certes, car tout est à Dieu et Dieu ne lui a rien donné. Mais vérité de ce que beaucoup de royaumes de ce monde se sont donnés à lui. Mais Jésus n’entre pas dans ce débat. Il est Fils du tout-puissant, il sait que « Tout a été créé par lui et pour lui » (Col. 1. 16). Il sait que bientôt, tout pouvoir lui sera donné dans le ciel et sur la terre (Matth. 28. 18). Il laisse le malin à ses illusions. Et refuse toute compromission dans le domaine de l’orgueil, du pouvoir et de la domination.

Dans sa réponse, Jésus va se placer sur un tout autre chemin : « Tu rendras hommage au Seigneur ton Dieu, et tu le serviras lui seul ». Au désir de pouvoir et de toute puissance, Jésus répond par l’adoration de Dieu et le service. La véritable adoration, celle qui est centrée sur Dieu seulement est chemin d’humilité, de prosternation. Elle met Dieu à sa place et nous remet en place ! Elle brise toute forme d’orgueil, toutes les formes de domination, ou de prétention. Elle conduit à la fraternité. Jésus parle aussi de service. Il est venu pour servir et non pour asservir. Il est le serviteur par excellence et nous invite à l’être aussi. Adore Dieu, mets-toi à son service, au service de tes semblables, c’est la réponse à la tentation du pouvoir. Servir Dieu, est un vaste projet, un beau projet, bien plus utile et gratifiant que l’orgueil, le mépris de l’autre. Louer Dieu, le remercier, qu’elle belle réponse au tentateur ! Aimer le prochain comme soi-même, et le servir, qu’elle beau ministère ! Dans le domaine du couple, de la famille, de l’église, de toutes nos relations, gardons-nous d’entrer dans la spirale infernale de l’orgueil.

3°) « Si tu es le Fils de Dieu, jette-toi d’ici en bas… »

La dernière tentation est la plus terrible, elle consiste à tenter Dieu lui-même ! Vouloir « domestiquer » Dieu, lui forcer la main, le contraindre à agir de façon insensée. C’est entrer dans une sorte de surenchère à la manière d’un enfant capricieux. C’est en quelque sorte, vouloir obliger Dieu, le mettre à son service… C’est quitter le terrain de la prière pour celui de l’exigence, de l’ultimatum : « Seigneur je te demande de faire cela… et si tu ne le fais pas… ! »  Quelle tentation terrible, insupportable pour Dieu ! Le défi ici est subtil, car le tentateur sait l’habiller de paroles bibliques, il cite le Ps. 91 : « Il donnera des ordres à ses anges… pour te garder… te porter… ». Oui Dieu garde ses enfants, il les porte… Mais, pas besoin de le contraindre pour cela. Il le fait de lui-même, de son amour, de sa bonté de sa fidélité… Il n’y a pas de doute à ce sujet. « Lui qui n’a pas épargné son propre Fils, mais l’a livré pour nous tous, comment, avec son Fils, ne nous donnerait-il pas tout ? » (Rom. 8. 32)

Et Jésus de répondre : « Tu ne tenteras pas le Seigneur ton Dieu… ». On ne joue pas avec Dieu. Il est Dieu ! Que nos prières soient toujours « prières confiantes ».

Conclusion : « Si tu es… »

Es-tu enfant de Dieu ? Si tu l’es en Jésus, tu seras tenté comme il l’a été dans son humanité. Mais n’oublie pas : Dieu pourvoit toujours aux besoins de ses enfants, nourrit ta vie intérieure de sa Parole, de son amour ; Adore-le et met toi à son service, au service de tes semblables, avec humilité, dans l’unité ; Ne tente pas Dieu, c’est insupportable pour Lui. Prie toujours avec humilité et confiance. Dieu sait ce dont tu as besoin. Il garde et porte toujours ses enfants. Que ce temps de carême soit temps de conversion, de décision, de renouveau, de victoire sur le tentateur. Soyons de véritables enfants de Dieu, heureux et forts de notre identité en Jésus.

Pasteur Joël Mikaélian

10/03/19